Service National Universel (SNU), nom masculin (origine : acharnement présidentiel) :
Dispositif d’endoctrinement et de formatage de la Jeunesse [1].Certain.e.s disent aussi de lui qu’il n’est rien d’autre qu’un dispositif de recrutement pour la police et l’armée.
Pour l’Education populaire ? Des uniformes !
Depuis le début, nous nous opposons à ce dispositif et exigeons son abandon immédiat car malgré l’effort de propagande fait autour de lui par le Gouvernement, il n’est rien d’autre qu’un énième dispositif souhaitant mettre au pas la Jeunesse. De plus, nous demandons à ce que les personnels Jeunesse et Sports ne soient plus associés à ce simulacre de « mixité sociale » qui n’est en fait rien d’autre qu’un acharnement du président de la République et un reflet parfait de la « politique communicationnelle ».
Dispositif décadent (re)cherche partenaires particuliers
Aujourd’hui, il n’est pas difficile de dire que le Service National Universel (SNU) est rejeté par l’écrasante majorité des acteurs.trices du champ de l’Education Populaire et la Jeunesse. La première fédération à avoir rejeté ce dispositif, dès octobre 2019, est la Fédération des Centres sociaux et Socioculturels de France (FCSF), depuis de très nombreuses organisations de Jeunesse et de l’Education populaire lui ont emboîté le pas.
En ce mois de mars, le Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (CNAJEP), par l’intermédiaire de sa vice-présidente Lucille Bertaud, émet même des doutes sur la « pertinence » du SNU concernant l’enjeu de la mixité sociale. De surcroît, le CNAJEP demande de “redéployer les crédits du SNU, vers une politique de jeunesse globale attentive aux jeunes qui en ont le plus besoin” [2].
Le contexte sanitaire ne fait que renforcer le besoin criant des associations d’avoir de réels financements en soutien au secteur associatif pour porter des projets de long terme et d’éducation populaire. La politique de Jeunesse menée par le Gouvernement (notamment à travers le SNU) n’est pas ancrée dans une vision stratégique de soutien, de participation à des initiatives, elle relève juste d’une politique marketing mensongère aux objectifs réels douteux. Cela revient en somme à se mettre des « paillettes dans les yeux », ça brille mais ça fait mal.
« On peut tromper une personne mille fois. On peut tromper mille personnes une fois. Mais on ne peut pas tromper mille personnes, mille fois. » (La cité de la Peur)
En 2020, la majorité des services s’insurgeaient contre l’impréparation du SNU et notamment de son séjour de cohésion. Un cahier des charges livré avec 3 mois de retard, des budgets inexistants à deux mois de la tenue du séjour, sans compter les cafouillages sur les contrats de travails des encadrants…
Cette situation intenable en 2020, devient insultante quand elle se reproduit à l’identique une année plus tard. Nous sommes fin mars, les séjours débutent dans 3 mois, et rien ne bouge, enfin si ça « ordonne » de se débrouiller. La crise sanitaire ne peut ni tout expliquer, ni tout excuser. Qu’est-ce qui explique cette faculté incroyable à préférer l’impréparation généralisée ou même l’absurde comme fondement ?
Pour rappel, les dates retenues pour les séjours de cohésion vont se heurter joyeusement à des périodes d’examens scolaires et à des dates de stages professionnels. Nous souhaitons voir dans cette « impréparation » une volonté non-assumée de faire capoter ce dispositif même dans les « plus hautes sphères » car quand c’est flou, y’a un loup.
« Elle panique à l’idée d’être de trop » (Olivia Ruiz)
Dans les plus hautes sphères de l’Administration de l’Etat, c’est la panique générale, le rafiot SNU tangue fortement, pourquoi ? Car la jeunesse n’en veut pas, n’en a jamais voulu et n’en voudra pas !
Alors que le Gouvernement crie dans tous les médias que le SNU vit une importante montée en charge [3], nous sommes obligé.e.s d’y apporter une lecture contradictoire. En effet, en 2021, l’objectif de jeunes en SNU est fixé à 25 000 alors que cet objectif était de 30 000 en 2020. Pour rappel, les « séjours de cohésion » ne se sont pas déroulés, en 2020, du fait de la crise sanitaire. Cette dernière a évité au Gouvernement de devoir justifier un lamentable (et heureux) échec. Les paillettes, ça pique les yeux.
Lorsque l’on passe comme objectif de 30 000 à 25 000, il ne faut pas être un.e grand.e mathématicien.ne pour voir que l’objectif est en forte baisse.Tel un Villani au sommet, nous pouvons annoncer que cela correspond à 14% de l’objectif-cible.
La panique énoncée plus haut dans notre propos n’est pas un ressenti car cette dernière est caractérisée. En effet, Marie-Anne Lévêque (Secrétaire générale du MENJS-MESRI) a rédigé un mail, ce mardi 16 mars au matin, évoquant la « nécessité d’intensifier la mobilisation pour atteindre l’objectif de 25 000 jeunes volontaires avant la fin de la campagne ». La panique est justifiée car il ne reste plus qu’un mois pour les inscriptions, à savoir jusqu’au 20 avril 2021.
Dans ce mail du 16 mars adressé à l’ensemble des Recteurs.trices, des Directeurs.trices Académiques des Services de l’Education Nationale et des DRAJES, la SG du MENJS-MESRI donne les ordres suivants (assez logique dans le cadre d’un dispositif de garde-à-vous) :
– « Les DASEN sont invités à organiser dans les meilleurs délais et dans le respect des consignes sanitaires des réunions départementales de chefs d’établissement, en s’appuyant sur leur chef de projet SNU. »
– «Les chefs d’établissement des lycées d’enseignement général et technologique et d’enseignement professionnel, privés sous contrat inclus, animeront des séances d’information adaptées au contexte sanitaire, d’ici à la fin mars. »
– Nous offrons un supplément cocasse contenu dans le mail : « nous vous invitons à poursuivre la dynamique de recrutement engagée, en restant vigilants sur une représentation équilibrée entre les personnels de l’Éducation nationale, de l’éducation populaire et des corps en uniforme ». Si vous souhaitez entamer une nouvelle poche de pop-corn à la lecture de ce document nous vous comprenons !
« Un jour il inventa l’argent, Ce démon très intelligent » (Les frères Jacques)
Le SNU n’est pas simplement un dispositif d’endoctrinement de la Jeunesse, il est aussi une gabegie financière et surtout un frein au développement d’une politique de jeunesse ambitieuse.
Pour 2021, le coût du SNU est estimé par le Sénat à 61 millions d’euros [4]. Comme le demande le CNAJEP, une réorientation immédiate des crédits vers une politique de Jeunesse serait le bienvenue et ce, encore plus dans le contexte actuel. Surtout quand nous savons le montant des rémunérations relativement élevées pour les chefs de centres (7080 euros pour 59 jours de travail maximum), quand d’autres participant.e.s auront droit à une rémunération assez faible à travers un Contrat d’Engagement Educatif (CEE). Enfin, ce qui est extraordinaire c’est que les agents publics de l’Education Nationale seront autorisé.e.s à s’absenter pour participer activement au SNU avec maintien du traitement plus le salaire pour chef.fe de centre par exemple. L’exemple est connu mais, lorsque le sens est douteux, l’argent est le dernier recours pour attirer.
On parle du coût prévisionnel estimé, et puis, il y a le coût réel qui intègre les dépenses jamais prévues qui finissent toujours par être siphonnées dans les crédits du BOP 163 (programme budgétaire « jeunesse et vie associative »). On sait déjà que dans des territoires, des crédits sont fléchés au niveau local pour le suivi des MIG du SNU, non prévu dans l’enveloppe actuellement, mais aussi sur la communication du dispositif. Nous savons également que dans de très nombreux territoires, de multiples demandes de subventions FDVA liées au SNU (notamment dans le cadre des Missions d’Intérêt Général, les fameuses MIG) sont aiguillées par les SDJES pour ne pas trop absorber l’enveloppe BOP 163 locale. Ce siphonage du BOP 163 et ces demandes FDVA vont avoir comme conséquence de diminuer encore le soutien financier au secteur associatif qui en a grandement besoin et dont les actions sont bien plus porteuses de mixité sociale, de liens entre les individus et d’éducation populaire que le Service National Universel !
Rendez-nous nos collègues !
Mais outre l’aspect financier, ce que nous ne disons pas assez souvent c’est que le SNU c’est plus d’une centaine d’ETP (équivalent temps-plein) mobilisés sur le sujet (au sein de la MPSNU, DASEN, SDJES, DRAJES, Rectorats, DJEPVA) ! C’est plus de 100 personnes consacrées au seul SNU, à l’unique SNU. Ces personnels en sont autant qui, de facto, ne peuvent pas œuvrer au développement de projets de territoires, de renforcer les liens avec le secteur associatif, qui ne peuvent accompagner les associations et les clubs et qui ne vont plus sur le terrain les éloignant de certaines réalités. La conséquence apparaît comme évidente, la baisse de l’efficience des politiques publiques de soutien à la vie associative et à la Jeunesse car on supprime depuis des années des centaines de postes JS (enfin on les « gèle ») et qu’on en mobilise une grande partie sur ce dispositif abject.
Ce constat rejoint les besoins exprimés par le Mouvement Associatif, en février 2021, à travers ses « 16 PROPOSITIONS pour une vie associative ambitieuse dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville » [5]. L’une d’elle, la numéro 3, est la suivante : « Renforcer les liens entre les CEPJ et les petites associations, notamment par la co-construction de projets communs, la mise en réseau d’acteurs et de ressources, la relocalisation au plus près des territoires pour un service public de qualité, dans l’intérêt des habitant.e.s.».
Et maintenant, qu’allons-nous faire ?
- Nous appelons l’ensemble des collègues à participer aux différents comités locaux contre le Service National Universel et à mobiliser nos partenaires.
- Nous demandons l’arrêt immédiat du SNU et la réorientation des montants non-dépensés aux différentes politiques de soutien à la vie associative.
- Nous exigeons qu’une réflexion soit entreprise par le gouvernement pour recréer un Service Public Jeunesse et Sports au service de l’intérêt général et de mener des politiques publiques coopératives. Vivons nos métiers comme ils doivent l’être, à savoir sur le terrain, au service de l’Education Populaire !
[1] Définition émanant du Dictionnaire informel de l’Education Populaire
[2] https://www.banquedesterritoires.fr/politiques-jeunesse-les-organisations-appellent-letat-et-les-collectivites-davantage-dambition
[3] https://www.leparisien.fr/societe/service-national-universel-cette-annee-nous-avons-double-le-budget-annonce-sarah-el-hairy-10-01-2021-8418257.php
[4] https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/service-national-universel-le-rapporteur-au-senat-critique-le-dispositif-2021
[5] https://lemouvementassociatif.org/wp-content/uploads/2021/02/LMA_QPV_16propositions_synthese.pdf
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